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HISTOIRE

DE LA

RÉVOLUTION

FRANÇAISE.

DEUXIÈME PARTIE,

DE

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CHAPITRE VIII.

Les Mon

Insurrection des départements contre le 31 mai; revers prolongés aux frontières; progrès des Vendéens. tagnards décrètent la constitution de 1793, et la suspendent aussitôt pour maintenir et renforcer le gouvernement révolutionnaire. Levée en masse; loi des suspects. Victoires des Montagnards dans l'intérieur et sur les frontières. Mort de la reine, des vingt-deux Girondins, etc.

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- Comité de salut public; sa puissance; ses membres. Calendrier républicain. Les vainqueurs du 31 mai se divisent. La faction ultra-révolutionnaire de la commune ou des hébertistes fait abolir le catholicisme, et décréter le culte de la raison; sa lutte avec le comité de salut public; sa défaite. - La faction modérée de la Montagne ou des dantonistes veut détruire la dictature révolu tionnaire, et rétablir le gouvernement légal; sa chute. Le comité de salut public reste seul et triomphant.

Il était à présumer que les Girondins ne souscriraient pas à leur défaite, et que le 31 mai serait le signal de l'insurrection des départements contre la Montagne et la commune de Paris. Il leur restait cette dernière épreuve à tenter; ils le firent mais dans cette mesure décisive on remarqua le même défaut de concert qui avait perdu leur cause dans l'assemblée. Il est douteux

que les Girondins eussent triomphé, même en se montrant unis, et surtout qu'en triomphant ils eussent sauvé la révolution. Comment auraient-ils fait, avec des lois justes, ce que les Montagnards firent avec des mesures violentes? Comment auraient-ils vaincu les ennemis étrangers sans fanatisme, comprimé les partis sans épouvante, nourri la multitude sans maximum, alimenté les armées sans réquisitions? Si le 31 mai avait eu lieu en sens inverse, on aurait probablement vu, dès-lors, ce qui se montra plus tard, le ralentissement de l'action révolutionnaire, les attaques redoublées de l'Europe, la reprise d'armes de la part de tous les partis, les journées de prairial, sans pouvoir repousser la multitude; les journées de vendémiaire sans pouvoir repousser les royalistes; l'invasion des coalisés, et, d'après la politique d'usage à cette époque, le morcellement de la France. La république n'était pas assez puissante pour suffire à tant d'attaques, comme elle le fit après la réaction de thermidor.

Quoi qu'il en soit, les Girondins, qui auraient dû ou rester, ou combattre ensemble, ne le firent point, et, après le 2 juin, tous les hommes modérés du parti restèrent sous le décret d'arrestation; tous les autres s'évadèrent. Vergniaud, Gensonné, Ducos, Fonfrède, etc., furent au

nombre des premiers. Pétion, Barbaroux, Guadet, Louvet, Buzot, Lanjuinais, au nombre des seconds. Ils se rendirent à Évreux, dans. le département de l'Eure, où Buzot avait beaucoup de crédit, et de là à Caen, dans le Calvados. Ils firent de cette ville le centre de l'insurrection. La Bretagne ne tarda pas à y prendre part. Les insurgés, sous le nom d'assemblée des départements réunis à Caen, formèrent une armée, nommèrent le général Wimphen pour la commander, arrêtèrent les Montagnards Romme et Prieur de la Marne, commissaires de la convention, et disposèrent tout pour marcher sur Paris. Ce fut de là que partit une jeune, belle et courageuse fille, Charlotte-Corday, pour punir Marat, le principal auteur du 31 mai et du 2 juin : elle crut sauver la république, en se dévouant pour elle. Mais la tyrannie ne tenait pas à un homme, elle tenait à un parti et à la situation violente de la république. Charlotte-Corday, après avoir exécuté (1) son généreux, mais inutile dessein,

(1) Voici quelques unes des réponses de cette fille héroïque devant le tribunal révolutionnaire: - Quelles étaient vos intentions en tuant Marat? - De faire cesser les troubles de la France. Y avait-il long-temps que vous aviez formé ce projet ?- Depuis l'affaire du 31 mai, jour de la proscription des députés du peuple. C'est donc dans les

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mourut avec une sérénité inaltérable, un courage modeste, et la satisfaction d'avoir bien fait. Mais Marat assassiné devint pour la multitude un plus grand objet d'enthousiasme encore que de son vivant. On l'invoqua sur les places publiques; son buste fut placé dans toutes les sociétés populaires, et la convention fut contrainte de lui accorder les honneurs du Panthéon.

En même temps Lyon se souleva, Marseille et Bordeaux prirent les armes, et plus de soixante départements adhérèrent à l'insurrection. Bientôt cette attaque amena le soulèvement général de tous les partis, et les royalistes s'emparèrent du mouvement que les Girondins avaient commencé. Lyon devint le chef-lieu de l'insurrection royaliste : cette ville était fort attachée à l'ancien ordre de choses. Ses manufactures de soie et de broderies, en or et en argent, son commerce de luxe, la rendaient dépendante des hautes classes. Elle devait donc se déclarer de bonne heure

journaux que vous avez appris que Marat était un anarchiste? -Oui, je savais qu'il pervertissait la France. J'ai tué, ajouta-t-elle en élevant extrêmement la voix, un homme pour en sauver cent mille; un scélérat, pour sauver des innocents; une bête féroce, pour donner le repos à mon pays. J'étais républicaine avant la révolution et je n'ai jamais manqué d'énergie.

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